Guillaume Erner est un illélectré ! ... Un quoi !?

Qu’est-ce que l’illélectrisme ?

Il s’agit d’un néologisme inspiré de l’illectronisme qui désigne un état d’une personne qui est désemparé face aux outils numériques et plus particulière à l’usage d’Internet. Ce néologisme d’illélectrisme signifie qu’on est désemparé ou ignare en matière de problématiques liés à l’énergie électrique. Ainsi on peut qualifier d’illélectrée une personne qui fait preuve d’illélectrisme. Et c’est objectivement le cas de Guillaume Erner, présentateur de la tranche matinale de France Culture ce jeudi 3 juin 2021 qui a pour invité Philippe Bihouix (ingénieur centralien spécialiste de l’épuisement des ressources minérales) et Philippe Salomon ( énergéticien, co-fondateur et vice-président de l’association Négawatt) venus pour débattre des difficultés de l’énergie éolienne à poursuivre ses implantations en France.

Le coût des éoliennes : en terme de puissance installée ou de production électrique réelle ?

En effet, ces implantations d’éoliennes sont de plus en plus contestées par les populations de riverains plus ou moins proches de celles-ci. Bien qu’elles soient promues en haut lieu par Barbara Pompili (Ministre de l’environnement et de la transition énergétique) il y en a d’autres qui s’y opposent comme Stéphane Bern (animateur de télévision) et Xavier Bertrand ( président de la région des Hauts-de-France). L’argument avancé par ces opposants concerne surtout le caractère esthétique de ces éoliennes qui défigureraient le paysage. Cependant, quand on voit à quel point les paysages ont été transformés par l’homme depuis 6000 ans ce n’est pas forcément l’argument à mettre en avant et surtout il s’agit d’une appréciation subjective. Est ensuite abordé, à partir de 16’20’’, la question du coût de ces implantations. Phillipe Salomon y répond en affirmant que le coût du mégawatt/heure est passé de 150 euros à 50 euros et conclut que cette énergie est aujourd’hui la plus concurrentielle. Ce qui ne semble pas interpeller Guillaume Erner. Mais pourquoi donc ce journaliste n’a t-il pas en tête les chiffres de la Cour des Comptes qui démontrent le contraire. En effet, un rapport de mars 2018 montre que les contrats de l’éolien vont coûter 40,7 milliards d’euros en 20 ans pour 2% de la production française. Par comparaison, le parc nucléaire français est estimé à 300 milliards d’euros pour 75% de l’électricité. Le ratio est très largement en faveur du nucléaire puisque il faut plus de 20 milliards d’euros à l’éolien pour produire 1% de cette électricité quand il n’en faut que 4 au nucléaire pour en produire autant. Et encore…, le nucléaire a une durée de vie de 50 ans contre 25 pour l’éolien ce qui divise encore par 2 ce ratio en faveur du nucléaire. Par ailleurs, pourquoi Guillaume Erner ne mentionne-t-il pas que si le coût de l’éolien est bas c’est parce que une grande partie des éléments de ces éoliennes viennent de Chine. Est-ce que la Chine, pays autoritaire, doit être un partenaire commercial dont on peut féliciter les bas coûts de production ? Autre interrogation : pourquoi accepter ces importations chinoises quand on sait que c’est grâce aux énergies fossiles qui alimentent les usines de ce pays que sont construits ces éléments d’éoliennes ? Même question concernant le transport par cargo fonctionnant au diesel entre la Chine et l’Europe qui permet d’acheminer les pièces en questions ? Enfin, est-ce que le prix des éoliennes restera toujours aussi bas quand le pétrole deviendra plus rare ?

Une gifle après un passage à tabac c’est négligeable…

Autour de 19’30’’ Guillaume Erner évoque le problème des atteintes à la flore et à la faune et en particulier aux dommages que les éoliennes peuvent causer aux oiseaux. Ce à quoi Thierry Salomon répond que les éoliennes tuent entre 0,5 et 20 oiseaux par an et que c’est bien peu comparé aux ravages que font les chats errants qui en tuent entre 50 et 60. C’est un peu comme si on se justifiait de donner une gifle à une personne qui viendrait d’être passé à tabac au prétexte que c’est peu de chose en comparaison. Pourquoi ne pas admettre que c’est un problème et qu’il n’y a pas de production énergétique, quelle qu’elle soit, qui ne porte atteinte à la faune et à la flore puisqu’il s’agit justement d’une transformation de la nature : l’énergie est une unité de mesure de transformation de la matière.

8000 éoliennes pour remplacer une centrale nucléaire ? s’il y a suffisamment de vent pour au moins 2000 d’entre elles !

Vers 26’30 Philippe Bihouix précise qu’il faudrait en tout 8000 éoliennes pour remplacer une centrale nucléaire. En effet, selon lui, même si la puissance installée de 2000 éoliennes équivaudrait à celle d’une centrale il faudrait multiplier ce nombre par 4 (donc 8000) pour arriver à produire autant d’électricité car les éoliennes fonctionne 4 fois moins de temps qu’une centrale. En théorie c’est vrai, en pratique c’est faux. Le facteur de charge d’une éolienne reste de 20% qu’elle soit installée à côté de 1999 éoliennes voisines ou pas. Cet ingénieur le sait mais il ne prend pas le temps d’expliquer que les 8000 éoliennes doivent être réparties géographiquement de telle sorte qu’au moins 2000 d’entre elles puissent recevoir la quantité de vent nécessaire pour qu’elles tournent à leur maximum pendant que les 6000 autres sont à l’arrêt. Le problème de cette absence de précision qui n’a pas été non plus corrigé par le journaliste revient à ce que l’auditeur peut considérer cette évaluation comme vrai.

Ce n’est pas parce que c’est de l’histoire ancienne que c’est dépassé

Vers 30’15 la perturbation stroboscopique que peuvent causer les pales des éoliennes en projetant leur ombre au sol à fréquence régulière est évoqué par Guillaume Erner. Alors Thierry Salomon invoque une pétition qui a circulé il y a 200 ans qui concernait le même effet provoqué par les moulins à vent et qui provoquait la peur chez les chevaux. Le ton badin et légèrement ironique employé par ce dernier laisse entendre que tout ceci est forcément "dépassé" puisque cela se passait il y a 200 ans. C’est une technique oratoire de déclassement ou de désamorçage en référence à un problème ancien et parce qu’il est ancien et que l’humanité y a survécu il n’y a plus lieu d’y revenir. Et Guillaume Erner laisse passer.

L’association Négawatt a plus intérêt a promouvoir la sobriété énergétique que les éoliennes

Au final il est curieux d’entendre Thierry Salomon promouvoir ce type d’énergie extrêmement coûteux et intermittent. A l’origine l’association Négawatt s’est fondée sur l’étude et la promotion de la réduction de la consommation énergétique en s’appuyant essentiellement sur la sobriété énergétique. Il est dommage que Thierry Salomon ne soit pas venu pour déplorer cette absence de volonté politique pour aller dans ce sens. En effet, si tout l’argent public qui a été et qui sera dépensé pour financer les implantations des énergies intermittentes avaient été orientées sur l’isolation du bâtit et le remplacement des chaudières au gaz ou au fuel et des climatisations par des pompes à chaleur, la France n’aurait pas remplacé seulement 2,7% de son électricité nucléaire mais aurait fait baisser de 10% sa consommation énergétique globale toutes énergies confondues (pétrole, gaz, charbon, nucléaire).

Pour réécouter l’émission de France Culture "L’Invité(e) des Matins" du 3 juin 2021 avec Philippe Bihouix et Thierry Salomon :

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