Pourquoi couper l’électricité de l’île de Jersey n’était pas du meilleur goût ?
vendredi 7 mai 2021, par
La colère des pêcheurs français
Pierre Hasky, dans sa chronique matinale du 07 mai 2021 considère qu’il n’est pas du meilleur goût que de couper l’électricité de l’île de Jersey (à 1’43’’) pour répondre au gouvernement britannique qui tarde à prendre les mesures nécessaires pour assurer aux pêcheurs français de pouvoir pêcher comme ils le réclament. En effet, les eaux territoriales autour des îles anglo-normandes sont une zone de pêche où ils avaient coutume d’exercer leur activité. Depuis les accords du Brexit, ces droits de pêche ont été redéfinis de manière beaucoup plus restrictive pour les chalutiers français ou européens. Par exemple, un pêcheur de Granville qui pouvait plus de 40 jours par an pêcher dans ces zones anglaises ne peut plus le faire aujourd’hui que 11 jours. C’est à cause de ces restrictions qu’une cinquantaine de bateaux français ont manifesté le 06/05/2021 au large de l’île anglo-normande de Jersey. Il s’en est suivi une escalade dans la démonstration de force où chaque partie, britannique et française, a envoyé des bateaux de guerre sur la zone et Annick Girardin, Ministre de la Mer, a renchérit en menaçant de couper l’électricité à l’île de Jersey.
Dans le cas de Jersey, le problème ne vient pas que de la pêche
Si Pierre Hasky trouve que ce n’est pas du meilleur goût de faire cette coupure on peut s’étonner au contraire que cela ne fût pas fait plus tôt. Non pas à la suite des restrictions de pêches à l’encontre de l’Europe mais parce que cette île est considérée comme un paradis fiscal avec une trentaine de banques et 231 fonds d’investissement avec un actif attractif de 394 milliards d’euros. Les revenus des sociétés étrangères sont taxés à 0 %. [1]
D’ailleurs, Nicolas Sarkozy, avait envoyé une première salve de postillons contre les paradis fiscaux en septembre 2009 en déclarant que l’ère des paradis fiscaux et du secret bancaire était "terminée". Ces belles paroles ne furent suivies d’aucune concrétisation et ses successeurs, François Hollande et Emmanuel Macron ont continué à ne rien faire. Il semble pourtant manifeste qu’aucune lutte efficace contre les paradis fiscaux ne peut se faire sans mesure coercitives fortes. Et la cessation d’approvisionnement en électricité en fait partie. Avec fatalisme, on pourrait penser que si un paradis fiscal disparaît ce seront les autres restant qui récupéreront ses "richesses". Mais n’empêche, ce genre d’action serait ressentie comme une mesure de justice au regard d’une grande majorité de la population. C’est parce qu’on ne donne pas ce sentiment de justice à cette population qu’elle finira par voter majoritairement avec ses pieds. Alors M. Hasky, si l’île de Jersey devait à l’avenir sentir l’odeur des gaz d’échappement des groupes électrogènes qui tournent au diesel parce que la France lui aurait coupé l’électricité on ne serait plus dans une faute de goût mais d’odeur.